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"ile flottante"ou "volante", se dit dans cette langue Laputa... (Jonathan Swift, Les voyages de Gulliver) |
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Présentation du film L'arrivée sur grand écran d'un dessin animé réalisé il y a plus de 15 ans mérite quelques explications. En effet, on pourrait penser que le succès du "Voyage de chihiro" en France est un prétexte pour nous ressortir de vieux films de Miyazaki datant d'avant sa gloire. Or, les raisons qui ont empéché ce film de parvenir sur nos écrans avant aujourd'hui n'ont rien à voir avec ses qualités intrinsèques. |
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Pour certains spécialistes, "Le château dans le Ciel" est même le chef d'oeuvre de Miyazaki, maître de l'animation japonaise. Il présente un scénario et des références plus accessibles que "Le voyage de Chihiro", des personnages drôles et attachants et une animation de tout premier ordre bien que réalisée entièrement à la main. Plus que dans
"Le
Voyage de Chihiro",
Miyazaki exprime par "Le château dans le Ciel" ses
passions et ses préoccupations les plus profondes
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Mais ses
préoccupations concernent aussi la relation
dégradée de l'Homme à son
environnement. Sans être au coeur du récit
comme dans Princesse
Mononoké,
la problématique de la relation
Homme-Nature
transparait par exemple dans les paysages de mines à
ciel ouvert au début du film. L'histoire commence et se termine dans le ciel, et se déroule à un rythme endiablé. c'est là un vrai récit d'Aventures avec des pirates, des poursuites, des batailles, des souterrains, le tout soutenu par les musiques remarquables signées Jo Hisaishi. |
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Les scènes d'action ont une telle force qu'on reste pantois du résultat obtenu sans aucun effet numérique. Pour autant, l'histoire ménage des moments contemplatifs d'une grande émotion, ainsi que beaucoup d'humour. |
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L'explication remonte à 1984, année ou Miyazaki réalise le film-culte "Nausicaä de la Vallée du Vent". Cette année là, un distributeur américain (dont je tais le nom par pudeur) en achète les droits pour les Etats-Unis. Le film sort en vidéo quelques mois plus tard aux USA et aussi (vous n'allez peut-être pas le croire) en France. Seulement voilà : non seulement le doublage a été fait de façon très médiocre (pour ne pas dire idiote), mais en plus le film a été amputé de plus d'une vingtaine de minutes de façon à respecter un format de 1h30. |
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Les noms des personnages ont tous été changés, les génériques coupés, et bien sur, tout cela sans que les auteurs en soient avertis... Cette sombre histoire a mis Hayao Miyazaki dans une colère noire. Et tous ceux qui ont travaillé avec le bonhomme vous le diront : mettre Miyazaki dans une telle rage est une TRES mauvaise chose à faire. Du coup, il va refuser de vendre les droits de ses oeuvres à l'étranger. C'est ainsi que des films extraordinaires comme "Le Château dans le Ciel", "Le service de livraison de la Sorcière", "Mon voisin Totoro" et d'autres resteront en attente des années durant ! |
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Il aura fallu la patience et l'acharnement de nombreux admirateurs, amateurs et professionnels, pour faire bouger les choses. C'est notamment Grâce à la persévérance de Gaumont - Buena Vista que les films de Miyazaki peuvent aujourd'hui, enfin, être montrés au public français. |
J'avoue avoir été envoûté par ce film, et le voir sur grand écran après une si longue attente fut un très grand moment. L'arrivée de Shiita, qui tombe littéralement du ciel dans les bras de Pazu, place d'emblée le film à la frontière du fantastique et de la Science-Fiction. |
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Le jeune garçon la regarde avec émerveillement. Il lui dira plus tard s'être demandé si elle n'était pas un ange... La poursuite sur la voie ferrée, qui rappelle les scènes les plus déjantées du 'Château de Cagliostro', ose détourner avec un humour dévastateur les plus grands poncifs du genre. |
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On découvre aussi dans ce film une Capitaine-pirate au caractère bien trempé, capable de dévorer une moitié de rôti d'un seul coup de dent, un équipage de gros-bras désopilants prêts à tout pour se faire bien voir et un robot guerrier aussi destructeur qu'émouvant (ce qui n'est pas peu de chose croyez-moi). Ce robot guerrier est un personnage à part entière que Miyazaki a réussi à rendre étonnament émouvant. Il me fait penser au Grand Automate dans "le Roi et l'Oiseau". Le contraste entre la douceur de ses gestes envers Shiita et son effrayant pouvoir destructeur symbolise à lui seul l'Humanité elle-même, avec toutes ses contradictions. Vous n'en serez peut-être pas surpris , mais Miyazaki est un admirateur du film de Paul Grimault, et les robots du "Château dans le Ciel" sont un écho lointain au "Grand Automate" imaginé par Grimault... |
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Quand les enfants arrivent sur Laputa, après 1h25 de film, c'est dans un silence presque total que se dévoilent les décors somptueux du Château volant. La montée progressive de la musique et la mise en relief des bâtiments par les ombres des nuages donnent une dimension légendaire à la cité en ruines. Morgan : Je pense à la scène ou l'on voit le mausolée lors de l'arrivée de Shiita et Pazu dans le jardin de Laputa, gardé par la carcasse d'un robot complètement rouillé et immobile. Pour moi cette scène montre tout le pathétique de cette cité fantôme. Plus rien si ce n'est des morts. Ceux qui étaient sensés êtres les nouveaux gardiens de cette formidable puissance (en attendant, qui sait, une éventuelle renaissance) sont à leur tour anéantis par une force plus grande encore, celle de la nature (symbolisée par l'arbre titanesque qui sert de fondation a la cité de Laputa). Ce robot "endormi" représente le futur de toutes les mécaniques de Laputa, mais aussi le futur de toute réalisation humaine : une déchéance inéluctable.Voir les moisissures et les animaux se rire de ces fières machines lisses et chromées qui sont la plus belle manifestation du "génie" inventif de l'humanité, cela donne à réfléchir... |
Cette section est appelée à se développer, car comme toujours Miyazaki propose à travers son film plusieurs niveaux de réflexion... N'hésitez donc pas à y revenir de temps en temps, ou à m'écrire pour vos suggestions. En particulier, le regard de Miyazaki n'est pas celui de Switf. Pourtant Miyazaki a beaucoup travaillé pour donner à son film une ambiance européenne. Mais il faut se resituer dans le contexte du début des années 1980. L'environnement faisait partie des grandes préoccupations de Miyazaki à l'époque, et d'ailleurs on retrouve dans "Le château dans le Ciel" plusieurs réminiscences de la série "Conan, le fils du Futur" (1978). Mais c'était aussi une époque de grande prospérité économique, les produits japonais en tous genres envahissaient le monde entier, et on portait aux nues le "modèle économique japonais". En décrivant dès 1986 un pays imaginaire futur aux ressources épuisées, et des gens sans scrupules à la recherche d'une puissance et d'une gloire mythique, Miyazaki faisait partie de ces rares visionnaires à traiter à la fois de la problématique du Pouvoir et de celle du développement durable. Son monde futur aux accents faussement Verniens, c'est en fait le parfait opposé du futur radieux qu'imaginait Jules Vernes. Un monde ou Pazu, le héros, promet à Shiita de l'accompagner dans sa vallée de Gondoa quand leurs aventures seront finies... Ici, ce n'est pas la technologie qui apporte le bonheur, mais le lien avec la Nature Vivante. |
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Paradis perdu et quête des origines. C'est un thème assez classique, que l'on retrouve aussi par exemple dans la série Les Mystérieuses Cités d'Or. Bien sur, le traitement est très différent, mais la trame de fond présente de nombreuses similitudes : Les protagonistes sont des enfants orphelins, à la recherche d'une partie de leur passé perdu. Un bijou est l'objet de convoitises, car il est la clé d'une source de richesses inépuisables et d'un pouvoir ancien et mystérieux. Dans leur quête, les enfants vont grandir et se révéler à eux mêmes et aux autres. A la fin (pardon si je vous gâche la surprise), les mêmes causes produisent les mêmes effets désastreux. On trouve aussi dans chaque cas un personnage au départ inquiétant qui finit par devenir l'allié des enfants (Mendoza dans les Cités dOr, et Dora dans "Le Château dans le Ciel"). |
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C'est bel et bien ce qui est en train d'arriver à notre civilisation, pour peu qu'on ouvre les yeux. Nous perdons petit à petit contact avec la Nature, les animaux et la forêt, et nous plaçons nos raisons de vivre et nos espoirs dans un mode de vie et des valeurs de plus en plus coupées de ces réalités que sont les saisons, la pluie, le soleil et les chants d'oiseaux... Les hommes ont abandonné Laputa, laissant la cité aérienne à la garde de quelques robots... les robots de Laputa ont un énorme pouvoir de destruction, mais une fois séparés de leurs maîtres, ils n'ont plus aucune volonté destructrice. Sans leurs maîtres, les robots n'ont rien fait d'autre que jardiner et s'occuper des quelques animaux qui sont restés. Voilà donc la plus noble utilisation que Miyazaki envisage pour la plus avancée des technologies : prendre soin des animaux et des fleurs après que l'homme aura disparu. |
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Ce robot couvert de mousses qui apporte une fleur à Shiita, c'est la Nature qui se rappelle à notre souvenir. C'est peut-être aussi une façon pour Miyazaki de surmonter son propre pessimisme : montrer que les plus terrifiantes créations humaines peuvent finalement susciter beauté et de l'émotion. |
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