Hommage à KON Satoshi et KAWAMOTO Kihashirô

 

En apprenant ce matin le décès de monsieur KON, j'ai été saisi d'une immense tristesse, et d'un sentiment de profonde injustice. Il aurait fêté ses quarante-sept ans en octobre 2010. Je ne peux m'empêcher de repenser au talentueux KONDÔ Yoshifumi, décédé quasiment au même âge en 1998. Le vide que laisse la disparition de monsieur KON n'est pas moins grand.

Je peux seulement dire que j'ai vu et étudié avec passion et admiration chacun des films de monsieur KON, et ajouter que sa série "Paranoïa Agent" demeure pour moi en tant que cinéaste une expérience déterminante. Je voyais en monsieur KON le meilleur réalisateur d'animation 2D de sa génération.

Par chance, j'ai assisté en décembre 2003 à la conférence qu'il donnait au Forum des Images. Comme tous ceux qui y étaient, j'ai été frappé par la courtoisie, la générosité et la simplicité de cet homme. J'évoque souvent, dans mes propres conférences, les souvenirs que m'ont laissé celle de monsieur KON. Il illustrait à merveille ce principe auquel je suis moi-même très attaché : nous ne sommes pas riches de ce que nous possédons, mais de ce que nous donnons aux autres. Il m'a personnellement beaucoup apporté lors sa Master Class, concernant en particulier son approche du décor en animation, et son travail sur la lumière.

KON Satoshi partageait ce trait de générosité avec l'autre grande figure de l'animation japonaise qui nous a quitté presque le même jour :
KAWAMOTO Kihashirô. Eblouissant animateur et metteur en scène de marionnettes en stop-motion, il était, dans son style propre, le pendant japonais de Ray HARRYHAUSEN, Ladislas STAREWICH ou Jiri TRNKA. Parmi mes meilleurs souvenirs du festival d'Hiroshima, auquel j'ai assisté en 2006, il y a les films mais aussi la silhouette et le sourire de monsieur Kawamoto, qui déambulait entre les projections vêtu d'un magnifique kimono traditionnel.

Je n'avais pas osé lui adresser la parole à l'époque, pas plus que je n'ai osé parler à monsieur KON en 2003. Je repense maintenant à ces moments avec un pincement de regret.

Aussi merveilleux soient-ils, les films ne remplacent pas les hommes.

  Gildas Jaffrennou
30 août 2010

ajout de sept 2013 : Dans les derniers jours de sa vie, Monsieur Kon a écrit cette lettre.