Corto Maltese en Sibérie de Pascal Morelli

Une aventure animée

Pascal Morelli a déjà réussi un prodige : convaincre des producteurs de miser sur un long-métrage d'animation destiné à un public plus large qu'à l'accoutumé, du moins par rapport aux habitudes occidentales.

Ellipsanime, Neuroplanet, Canal +, France 2 et la chaîne italienne RAI l'ont suivi dans cette aventure, qui est aussi un pari.

Depuis 'Le château des Singes' de Jean-François Laguionie (1999) un vent nouveau souffle sur l'animation française et européenne. Du succès ou de l'échec de ce film dépendent beaucoup de choses pour l'avenir du cinéma d'animation en France !

Point de vue

Si vous n'êtes pas familier des oeuvres d'Hugo Pratt, le film peut vous surprendre par son rythme et son ton.

Ne cherchez pas la structure narrative classique d'un scénario de film d'aventure. Corto Maltese, c'est d'abord une ambiance, un regard un peu décalé, mi-rêveur mi-idéaliste sur le monde. Il y a certes dans l'histoire un trésor qui fait courir tous les protagonistes, mais pourtant le propos du film n'est pas de raconter une chasse au trésor.

Pacal Morelli a suivi Pratt comme son ombre : le trésor, c'est juste le prétexte au départ.
Tout ce que Corto va rencontrer sur son chemin importe bien plus que le trésor qu'il espère trouver au bout. L'amour peut-être...

Et en fait de rencontres, son parcours le fait passer de la Chine à la Sibérie en passant par la Mongolie, tout cela à une époque ou ces régions étaient plongées dans de graves troubles. Corto va croiser un aventurier américain, une contesse russe sur le point de perdre le seul bien qui lui reste, des chefs de guerre violents et sans scrupules, des sociétés secrètes, et des paysages...

Le film est d'abord un voyage, à travers l'Orient et l'extrême-Orient, à travers les steppes sibériennes, et aussi à travers le temps, l'espoir et les désastres.

On pourrait reprocher à Morelli la multitude de personnages, la violence de certaines scènes et l'effet 'kaléidoscope' que donne la succession incessante des situations que traverse Corto. Mais ce serait malhonnête, car ce n'est là qu'un reflet de l'oeuvre originale. Oui, les histoires dessinées par Pratt sont ainsi, pleines d'imprévus, de changements de caps, de poésie, et parfois aussi de violence. Même les scènes dénudées sont fidèles à l'oeuvre originale.

Le pari réussi de ce film, c'est de transposer un dessin à l'encre noire, fait rapidement en quelques traits, en une animation en couleur, avec des décors autrement plus élaborés que dans une bande dessinée.
Sur le plan technique, le film est vraiment très réussi. Les éléments animés par ordinateurs (avion, trains) sont juste assez stylisés pour ne pas déparer avec l'animation "cellulo" des personnages. Certaines scènes sont même tout à fait spectaculaires.

Le seul petit bémol concerne la bande son. Les acteurs qui ont donné leurs voix aux personnages n'ont pas des voix suffisament typées pour "coller" correctement à tous les personnages, et le ton général des dialogues m'a paru un peu monocorde.
Je vous recommande néammoins ce film, qui risque de rester un événement exeptionnel dans le paysage cinématographique français. Ce n'est ni un film pour enfant, ni même un conte.

Ce film est plutôt une fable poétique, pleine d'émotion, de bruits et de fureur.


Hugo Pratt

Corto Maltese

Ne ratez pas ce film !

 

Il y a sans doute beaucoup de Pratt lui-même dans son personnage.

 

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